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Erika: Bonjour Amina, est-ce que tu pourrais te présenter et nous présenter SignMove ?
Amina: Bonjour, je suis Amina Ben Yelles, fondatrice de SignMove, une entreprise de l’Économie Sociale et Solidaire dont l’objectif est de faciliter la mobilité pour tous. Je me concentre particulièrement sur les personnes dites en situation de handicap, qui sont en capacité administrative de passer leur permis. L’objectif de Signmove s’articule autour de trois étapes :
La première étape concerne le code de la route, avec une plateforme d’apprentissage accessible à tous, quels que soient leurs besoins, afin de permettre à chacun de s’entraîner et d’apprendre le code de la route qui est un apprentissage complexe.
La deuxième étape concerne la partie conduite. Nous formons des auto-écoles partout en France afin qu’elles puissent prendre le relais. Nous jouons aussi un rôle de référencement, car il est parfois difficile de savoir quelles auto-écoles sont capables d’accueillir des personnes en situation de handicap.
Enfin, la troisième étape consiste à travailler avec l’État pour rendre les examens plus accessibles qu’ils ne le sont aujourd’hui. Actuellement, il existe des examens aménagés pour les personnes en situation de handicap, mais cela reste un parcours du combattant. Les procédures sont souvent complexes et varient d’un département à l’autre.
Erika: Comment SignMove rend accessible l’apprentissage de la conduite aux personnes en situation de handicap, à travers l’usage d’outils numérique ?
Amina: Pour ce qui est du code de la route, en particulier la partie théorique, nous utilisons le numérique car il permet de répondre à un maximum de besoins. Nous nous basons sur le principe de conception universelle, un concept international dont le but est de créer un produit ou un service utilisable par tous, quel que soit l’usage ou l’outil utilisé pour y accéder.
Nous intervenons à deux niveaux : d’abord sur la forme, c’est-à-dire le format. La plateforme numérique doit être accessible, en respectant les normes internationales d’accessibilité numérique, les WCAG. En France, ces normes sont adaptées sous le nom du RGAA, qui prend en compte deux niveaux de critères : le niveau A et le niveau AA, alors que les normes internationales couvrent également un troisième niveau, le AAA. Nous cherchons à atteindre les niveaux les plus exigeants en matière de bonnes pratiques pour garantir l’accessibilité à tous.
Nous concevons tout pour que cela soit accessible, notamment pour les personnes sourdes, avec une traduction en langue des signes, et pour les personnes ayant des troubles du neuro-développement, comme la dyslexie, la dyspraxie, ou encore les troubles du spectre autistique. Cela inclut aussi les personnes qui ont des difficultés à appréhender les outils numériques.
Ensuite, nous travaillons sur la partie pédagogique avec un support unique, mais utilisable par le plus grand nombre. Nous intégrons des traductions en langue des signes, du contenu en ‘facile à lire et à comprendre’, ainsi que des vidéos en animation 3D afin que l’apprentissage soit adapté au fonctionnement cognitif des bénéficiaires. »
Erika: Quels défis avez-vous rencontré pour adapter vos solutions aux personnes en situation de handicap ?
Amina: Je pense que le principal défi réside surtout dans la difficulté de trouver des prestataires qui maîtrisent l’accessibilité numérique. Pour moi, les contraintes nourrissent la créativité, c’est une idée que j’aime souvent répéter. Comme l’accessibilité est quelque chose de naturel et inhérent à ma démarche, elle ne constitue pas un obstacle dans la conception. Il y a aussi une dimension RSE importante dans notre manière de produire, notamment en choisissant des entreprises françaises, par exemple pour les serveurs, et des entreprises qui mesurent leur impact écologique. Nous savons que le numérique a aujourd’hui un impact écologique conséquent.
J’ai également privilégié des entreprises locales, notamment à Bordeaux, car j’ai reçu un soutien du tissu économique bordelais. Il était donc important pour moi de penser local. Cependant, il y a très peu de développeurs ou de designers UX/UI à Bordeaux qui sont vraiment sensibilisés à l’accessibilité numérique. Cela nécessite un véritable accompagnement et une co-construction à chaque étape du projet. C’était le plus grand défi. Le véritable défi a été d’accompagner ces prestataires dans leur formation et de les faire monter en compétence sur l’accessibilité.
Erika: Quels conseils donnerais-tu aux entreprises voulant s’engager dans l’inclusion numérique pour des publics spécifiques ?
Amina: En concevant des solutions pour les personnes ayant des besoins spécifiques, on s’assure également d’être accessible aux autres. Même les personnes qui, un jour, pourraient rencontrer des difficultés de compréhension ou qui seraient en situation de handicap temporaire bénéficieront de cette accessibilité universelle.
Il est donc crucial de penser à l’accessibilité dès le début du projet pour éviter de déconstruire ce qui a été construit par la suite. Souvent, cela implique de revoir certaines bases. Il ne faut pas non plus avoir peur, car c’est plus facile que cela n’y paraît. Une fois que l’accessibilité est intégrée et acceptée comme une ligne directrice, il devient clair qu’il y aura un cadre ou des contraintes à respecter. Cela permettra aux designers, aux ingénieurs et aux techniciens des différentes structures de nourrir leur créativité et de concevoir, peut-être même, un produit plus performant que ce qu’il aurait été initialement.
Ainsi, mon premier conseil serait de penser à l’accessibilité dès le départ. Le deuxième conseil serait de ne pas hésiter à progresser par étapes. Si, au début, vous pouvez aborder seulement une partie du projet, c’est déjà un bon début ! Cela permettra aux équipes de se familiariser avec ces sujets, de monter en compétences et de se sentir à l’aise avec ces enjeux.
Merci à Amina pour ses réponses à nos questions et pour suivre toute l’actualité et les actions menées par Signmove rendez-vous sur leur site internet et sur leur compte Linkedin
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